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Quatre jours plus tard, alors que Bergen affiche 275 jours de pluie par an et que pour nous le soleil a continuellement brillé au cours l'étape, nous remonterons tout le littoral Norvégien jusqu’à Tromsø sous un ciel bleu azur et de journées qui n’en finissent pas. Les fjords, les mouillages et les ports se ressemblent étrangement. Le long du trajet pas de nette rupture du sud au nord dans les paysages grandioses, avec leurs sommets toujours enneigés en ce début d’été. La navigation dans et entre la montagne, parmi des parois montagneuses à la verticalité étonnante rejoignant la mer abruptement est étonnante.

Tableaux parfois oppressants, surtout par brouillard ou crachin, par temps très nuageux lorsque la mer s’agite et se noircit se confondant avec le rivage. Encore  plus écrasant, peut-être aux  Lofoten où les hautes montagnes escarpées aux sommets pointus, acérés et élevés surgies de l’océan, accentuent ce sentiment. La roche souvent à nue laisse quelques rares endroits aux lichens et arbustes où pousser. La vie doit y être âpre et certainement rude, encore plus l’hiver lors des nuits sans fin. Les maisons toujours de couleurs vives apparaissent lilliputiennes, perdues au pied de ces éminences rocheuses, moussues ou pelées. Les rares arbres  semblent sur les versants, comme peignés par le vent. A notre passage, les habitants depuis leur terrasse ou la rive font de grands signes de la main en guise de bienvenue.

Aux relâches dans les ports nous discuterons avec d’autres navigateurs ou gens du pays. L’accueil toujours emprunt de gentillesse, a été souriant et courtois, y compris à la douane à notre arrivée. Nous ne parlons pas norvégien mais pratiquement tout le monde s’exprime plus ou moins en anglais. Une autre particularité  est que l’alcool est hors de prix. Pour un remerciement ou un échange il nous est arrivé d’offrir une bouteille de vin, nous avons toujours eu le sentiment de faire un cadeau royal et apprécié.

En Norvège la température est clémente, avoisine seize à vingt degrés en journée pendant l’été. La navigation dans les chenaux intérieurs délimités entre les nombreuses îles extérieures et le littoral permet de naviguer sans rencontrer de grosse mer quelle que soit l’intensité du vent. Trop souvent ce vent, essentiellement de direction nord-est sur la côte en été, souffle de face dans les fjords ou les défilés étroits et la progression se fait le plus souvent au moteur. Difficile de faire autrement car tirer des bords dans ces « chenaux » tortueux plein de cailloux, (parfois pas plus de 20 mètres de large), n’est pas réaliste. Si en plus on y ajoute un courant aléatoire en force et en direction on aurait bien du mal à progresser sous voiles. Le balisage est précis, les balises et les phares très nombreux, l’absence de nuit facilite la navigation. Parfois le manque de passage intérieur oblige à naviguer de nouveau en pleine mer mais près de la côte. L’approche et le passage de certains de ces caps et péninsules sont extrêmement dangereux dès que le vent se lève et la mer se forme du fait du relief sous-marin désordonné. Même par beau temps la mer peut déferler. Une écoute attentive des bulletins météo est indispensable. La météorologie norvégienne dans son bulletin mentionne systématiquement la hauteur des vagues de la zone de Statt par exemple. A plusieurs reprises les vents atteindront 7 voire 8 beaufort malgré un beau soleil et un ciel resplendissant, alors prudence.

De multiples ponts et lignes électriques enjambent les chenaux et canaux reliant les innombrables îles au continent. Pour la route empruntée vérifier sur la carte que la hauteur des ponts et lignes électriques soit compatible avec la hauteur de la mâture, ne pas omettre de rajouter la hauteur de l’emplanture de mât par rapport à la flottaison et y rajouter « un pied de pilote ». Sinon reprendre la carte et repérer un autre itinéraire possible dans l’entrelacement de tous ces canaux. Les fermes marines se développent  considérablement et ne sont pas toujours signalées sur les cartes, ou signalées sur les cartes elles ont déménagées ou disparues. La vigilance est de rigueur pour ne pas les côtoyer de trop près.

Pour la première fois nous avions une cartographie électronique. Elle se révèlera une aide précieuse pour la navigation surtout par temps de brouillard, mais avec toujours, quand même, étalée sur la table à carte, une carte papier en l’occurrence du service hydrographique norvégien en complément de la cartographie électronique (Navionics) complétée du guide Imray sur la Norvège de Judy Lomax. Cette cartographie électronique nous a permis de limiter l’achat des nombreuses cartes de détail indispensables pour naviguer dans cette région pavée d’une infinité de cailloux. Nous l’avions connecté à un AIS récepteur mais aussi émetteur. Sur la cartographie à l’écran notre position et celles des cargos et ferries étaient affichées et eux pouvaient nous localiser sur leurs systèmes de navigation. Intéressant et utile dans les zones à fort trafic pour voir et être vu. A plusieurs reprises de gros bateaux ont incurvé leur route à notre approche. L’AIS est une aide à la navigation  très précieuse et complémentaire du radar la nuit ou par temps bouché.

Par contre du souci avec la réception des bulletins météo au Navtex. Dans plusieurs zones aucune réception vraisemblablement lié à la configuration géographique. Il reste les bulletins à la radio mais en norvégien. En contrepartie dans toutes les bibliothèques en Norvège, il existe un accès internet libre et gratuit d’une demi-heure minimum ce qui permet de se connecter au site météo de son choix et de pallier à la déficience du Navtex.  Dans certain port il y a la possibilité d’avoir une connexion internet par wifi et de récupérer les bulletins météorologiques. A Tromsø nous avons pris la liberté de nous rendre directement au centre météorologique où nous avons été fort bien accueilli.

  

Au cours de ce périple peu de voiliers étrangers croisés et seulement quelques voiliers norvégiens. Il y a nombre de « barques » à moteur, chaque Norvégien doit posséder la sienne. En contrepartie pas d’embouteillage sur les plans d’eau et pas de « tribord amure » braillé à tue-tête. Le risque de collision est réduit, sauf éventuellement avec les cargos empruntant ces passages étroits comme n’importe quel vulgaire youyou. Il est toujours saisissant de voir surgir un énorme cargo ou « building » à passagers au détour du coude d’un fjord. L’AIS nous aidé à éviter ces rencontres.

Les mouillages sont innombrables et globalement bien protégés, pas du tout encombrés. Présence de nombreux petits ports dans lesquels parfois un ponton pour quelques bateaux de passage a été installé. Quelques marinas aussi, jamais très grandes. Les structures sont réduites et dans ces petits ports il n’y a pas de personnel mais une « honestybox » où chacun verse son écot avant de repartir et ça fonctionne. Le prix en général unique quelle que soit la taille du bateau reste peu onéreux dans l’ensemble, entre 50 et 100 couronnes (soit 6 à 12 euros), avec le plus souvent  l’eau et l’électricité compris. Le plus cher fut 200 couronnes à Tromsø. C’est la seule chose bon marché avec le gazole (moins de 1 euro le litre) qui reste à un prix raisonnable dans ce pays.

La croisière à proprement parlée débute en Norvège par un premier départ le 16 juin de Bergen. Le 18 juin une sévère pneumopathie terrasse un des deux équipiers à Måløy, un coin perdu de la côte. Après trois jours d’une fièvre de cheval, l’équipier décida de rebrousser chemin avec le reste de l’équipage, sur Bergen lieu moins isolé. Nouveau départ le 27 juin après une franche amélioration de l’état de santé du malheureux équipier.

Le 27 au soir mouillage de rêve à Skifjord.

Le 28 toujours au soir nous touchons Raudoya et ancrons au creux d’une île dans une anse naturelle : superbe.

Le 29 le port de Kristiansund  nous propose une place au ponton occupé par quelques voiliers. Un orage menace en développant des couleurs d’une limpidité incomparables avant d’éclater et laisser échapper quelques misérables gouttes de pluie.

Le 30accostage à Uthaug un tout petit port de pêche vide de chalutiers, néanmoins équipé d’une usine de traitement du poisson. A l’opposé une minuscule marina pourvue d’un grand ponton disproportionné et inoccupé, nous reçoit.  Au voisinage d’une cabane légèrement délabrée, vraisemblablement la capitainerie et les toilettes, un jeune couple de norvégiens, grands et bien en chair  avancent sur leur bicyclette en descendent et se dirigent vers nous. Eux même navigateurs et en vacances chez les parents de madame, ils n’ont pu résister à l’envie de s’approcher de Noème après l’avoir aperçu de loin se diriger vers le port. Ils ont enfourché leurs bicyclettes et pédalé à toute vitesse  pour essayer de parvenir avant nous au port. Nous avons été les plus rapides. S’ensuivra la visite du voilier tout en discutant construction et navigation durant une bonne heure.

Le lendemain un brouillard si dense s’est levé qu’il est impossible de déceler l’entrée du port. La carte électronique et le radar  facilitent le décollage du ponton et le repérage de la sortie pour se faufiler ensuite au moteur dans ce dédale de passes. En milieu de matinée le brouillard se dissipera découvrant un paysage irréel enveloppé des derniers bancs de brume qui s’émiettent furtivement. En fin de journée, amarrage à un appontement recouvert d’énormes  pneus à l’entrée de Rorvik car la marina est comble. Cette petite ville sans charme particulier par un temps grisâtre ne nous enthousiasme guère.

Le 2 juillet au soir après une navigation sans problème la nuit est passée à Sandnessjøen,  au pied d’une montagne de 1075 mètres surplombant cette ville de plus de 5000 habitants, et dont le port actif  est un dortoir pour nombre de ferries. La marina située tout à fait au fond du bassin offre un bon abri.

Le 3 juillet au près avec 30 nœuds de vent, secoués toute la journée dans une mer inconfortable arrivée à Bodø.  Le port de plaisance est isolé du reste du port commercial et de pêche par un long ponton flottant dont seul l’extérieur est autorisé à l’amarrage pour les yachts  de passage et tout à fait incommode puisque exposé aux sillages  des cargos et ferries qui entrent et sortent du port commercial toute le journée. De plus le vent continue à souffler 30 nœuds. Tous les pare-battages sont ordonnancés régulièrement à tribord pour protéger le bordé, avant d’afflanquer le ponton. Poussé par le vent Noème cogne assez brutalement le ponton lui aussi agité dans tous les sens, montant et descendant gaillardement au rythme de la houle et des vagues. Les grosses défenses s’écrasent et amortissent correctement  les soubresauts. Noème reste collé au ponton sous la pression du vent. Une fois à poste les amarres ne sont pas  excessivement raidies pour éviter un effet ressort trop important.  Vérification que tout se passe correctement avant d’aller se dégourdir les jambes en visitant Bødø

  

Voyage en Norvège 2009